Lorsque le projet "fais ta valise !" a été proposé au sein de l'association des Ateliers du Portail l'idée initiale semblait claire : des valises uniques, personnalisées par des créateurs, chacune racontant une histoire par ses couleurs, ses formes et ses inspirations. 

Une idée simple et joyeuse, née d'un précédent projet mené avec des personnes en situation de handicap en Belgique. Mais rapidement, au fil des discussions et des échanges, le projet s'est transformé, échappant à ce cadre initial pour devenir bien plus. 

La valise n'était plus seulement un objet à décorer : elle s'est imposé comme un moyen d'expression universelle. Ce simple contenant s'est métamorphosé en un véhicule d'histoires, de souvenirs, d'espoirs et parfois de déceptions. 

Les contraintes esthétiques ou techniques ont été levées ouvrant les portes à une participation large et inclusive. Ce fut "un micro ouvert" à chacun, quelque soit son âge, son parcours ou son expérience.

Les valises sont venus de partout : des Établissements d'hébergement pour personnes agées dépendantes (Ehpad), des centres de loisirs, des écoles, des centres d'accueil pour réfugiés, les artistes locaux et bien sûr, des habitants du village... Le bouche-à-oreille a fait son œuvre et la question est devenu omniprésente : "tu as fait ta valise ?"

Chaque valise racontait une histoire unique, remplie de souvenirs, d'objets nostalgiques ou de messages émouvants. Elles portaient toutes la marque intime de leur auteur, révélant une diversité humaine fascinante. 

Petites ou grandes, fermées ou ouvertes, sobres ou excentriques, ces valises reflétaient une sincérité désarmante. Elles rappelaient l'art brut tel que défini Dubuffet : une expression authentique, libérée de toute ambition mercantile, recentrant l'art sur sa pureté originelle.

Je je me souviens encore de Marlène, qui, d'un geste timide, a apporté une petite valise contenant les ingrédients de son goûter d'écolière. Je pense aussi à Pascale, qui avait choisi de rendre hommage à son père récemment disparu en présentant des objets soigneusement sélectionnés. Il y a ces enfants de l'école, qui, dès le lendemain de leur visite, reviennent fièrement avec leurs parents pour leur faire admirer leurs créations. Enfin je n'oublie pas les nombreux textes émouvants parfois drôles des résidents des Ehpad, des écrits si riche qu'ils mériteraient, à eux seuls une publication. 

Ce projet, qui avait commencé comme une simple proposition artistique, a pris une ampleur que je n'avais pas imaginée. Il m'a bouleversé, changé, remis en question. Et si la création, au-delà des critères esthétiques ou des jugements de valeur, résidait simplement dans cette élan ?

Merci à tous ceux qui ont participé !